Table des matières
Résumé
L’approche globale socio-économique des villes
A/
B/
Le modèle globale d’équilibre urbain Pirandello
A/
B/
C/
D/
E/
F/
G/
Utilisation du modèle Pirandello
–
Conclusion
Annexes
Pirandello®, un nouvel outil d’aide à la décision
« Ce n’est pas en perfectionnant la bougie qu’on a inventé l’électricité »
L’approche globale socio-économique des villes
Dans les transports urbains, les études de trafic et les études économiques partent en général du principe que la localisation des emplois et celle des habitants sont connues, et stables sur la période à étudier. Le développement de concessions d’ouvrages urbains de durées de l’ordre de 60 à 70 ans conduit cependant à devoir intégrer l’évolution urbaine due à l’existence même de l’ouvrage nouveau : il s’agit d’internaliser dans le modèle la matrice de demande de déplacements, c’est-à-dire qu’il s’agit de faire un modèle urbain et non un modèle de transports. Depuis une dizaine d’années, le groupe Vinci travaille sur ce sujet et vient de finaliser un modèle global urbain, nommé Pirandello®.
Ce modèle recherche la position d’équilibre entre les forces tendant à concentrer les gens vers le centre ville (attractivité des services offerts) et celles qui tendent à les étaler (recherche de confort spatial et d’espaces verts). Analysant la population de la ville par tranches de revenus et par types d’emplois, Pirandello® reconstitue la logique de localisation des ménages selon leurs revenus et celle des entreprises qui recherchent à maximiser leurs bénéfices. Il peut ainsi être utilisé pour tester des principes d’aménagements urbains, de tarification de zones, d’ouvrages de transports, de consommation de CO2… Bien entendu, Pirandello® mesure l’efficacité socio-économique globale de ces projets ou de ces règlementations. C’est un outil pratique d’aide à la décision en ce qui concerne l’aménagement et la vie des grandes agglomérations.
La faiblesse actuelle de l’approche économique des villes
Dans le domaine interurbain, la connaissance scientifique de l’économie des transports, déjà pertinente, est régulièrement améliorée. Les Commissions des Chambres, les Administrations techniques, le Conseil Général des Ponts et Chaussées, le Ministère des Finances, les Universités, les entreprises, les bureaux d’études et encore bien d’autres organismes ont développé ce sujet. En plus, de nombreux rapports de hautes personnalités viennent régulièrement éclairer les organismes décideurs tels que le Conseil d’Analyse Economique, et le Conseil Economique et Social.
Dans le domaine urbain, en revanche, il y a beaucoup moins d’études économiques globales aptes à conduire à des décisions concrètes ; la littérature y est souvent théorique, et donc malaisée à appliquer à un projet bien défini. L’interaction entre la structure des réseaux de transport et la forme urbaine (logements, emplois) est connue depuis toujours, mais elle l’est qualitativement plutôt que quantitativement. Les modèles urbains, ou de « land use » existent bien, mais ils demandent en général la détermination économétrique de très nombreux paramètres, combinée avec la formulation d’un grand nombre d’hypothèses. Ceci rend leur développement complexe, sinon pratiquement impossible. En absence de tels outils, l’aspect économique et social global à l’échelle d’une agglomération est très rarement quantifié..
Quant à l’impact de la politique des péages sur le comportement des habitants, il n’y a guère que le concept « d’amertume » qui ait apporté un éclairage nouveau.
C’est regrettable, car la question de l’économie urbaine se pose aujourd’hui de façon très concrète, tant sous l’angle du développement durable (social, économique et environnemental) que spécifiquement sous celui du renouvellement urbain et de ses problèmes de financement.
En effet, le point clé est le suivant : le montant financier disponible pour financer un ouvrage est une fraction du bénéfice socio-économique qu’il engendre. Plus l’ouvrage – ou la rénovation urbaine-_ crée de bénéfice socio-économique, plus le financement sera facile à mettre en place. De plus, l’opportunité que crée aujourd’hui la généralisation progressive des financements longs (concessions et contrats de partenariat) sera d’autant mieux utilisée qu’on aura une meilleure connaissance du bénéfice socio-économique qu’engendrent les ouvrages et donc de la fraction de ce bénéfice qui peut être convertie en financement. Qui prendrait un risque de financement sans avoir une bonne appréciation des recettes, donc de la rentabilité socio-économique de l’ouvrage ?
La construction de stades, d’écoles, et les grands projets de transports tels que A 86 Ouest et Roissy express structurent la ville et modifient l’attractivité des quartiers. Une bonne connaissance
– du supplément de bien-être ou de richesse qu’ils engendrent, et
– de la localisation de cette richesse à l’intérieur de la ville
facilite la mise en place des financements.
Ceci est particulièrement vrai pour les ouvrages de transports, et particulièrement pour les ouvrages routiers à péage. Le supplément de bien-être engendré, et sa localisation, jouent un rôle clé dans la décision de faire ou de ne pas faire les ouvrages. La décision politique balance en général un certain sentiment sur l’efficacité économique globale de la dépense et l’estimation globale des coûts. C’est pour chiffrer de façon aussi objective que possible ce sentiment que nous avons conçu le modèle urbain décrit ci-après.
Pour illustrer notre propos, prenons l’exemple des projets routiers récents. De tous les projets d’ouvrages routiers à péage étudiés depuis 20 ans en région Ile-de-France, les deux seuls qui ont été menés à bien sont les plus anciens et, par conséquent, les mieux intégrés à l’agglomération du point de vue urbain :
- A 14 – sur l’axe historique dessiné par Henri IVet Louis XIII- et
- A 86 Ouest, dont le tracé a été inscrit dans tous les plans d’urbanisme de l’Ile-de-France depuis 1932 (plans Prost en 1932, Sudreau puis surtout Delouvrier en 1965).
En revanche, la mort rapide des projets LASER, MUSE, RSP, HYSOPE, et VILLEXPRESS montre que les orientations qui avaient donnée pour leur développement dans les années 1985-1995, ne répondaient pas à toute la complexité du sujet.
En effet, ces projets avaient trois défauts majeurs :
- Une tendance à négliger les phénomènes urbains qui se produisent aux extrémités des tunnels routiers ;
- Une approche politico-administrative étriquée, dans la mesure où les projets étaient limités à tel ou tel département, au détriment de la vision francilienne globale ;
- Un manque de vision économique globale et dynamique.
Si l’on reprend le projet A 86 Ouest, il y a 20 ans déjà le principe de la concession a été retenu. A la fin des années 90, un appel d’offres de concession a été lancé, la société Cofiroute a été attributaire du contrat.
La question des prévisions de trafic et de recettes était évidemment cruciale, et.la durée du contrat est si longue (plus de 60 ans) qu’il y avait problème à extrapoler simplement les résultats données par la méthode classique des modèles de transports dits « à 4 étapes ». Il fallait inventer un nouveau procédé, visant à estimer ce que pourrait devenir la structure urbaine à long terme. Cette prévision devait se faire tant en termes de demande future de déplacements –tous modes confondus- qu’en termes sociologiques, pour décrire les futurs consentements à payer. La fréquentation de l’ouvrage à long terme s’en déduit alors, ainsi que l’estimation des recettes futures. Cela a été le début de la conception du modèle global urbain.
Il s’agit donc de construire un modèle urbain pratique et utilisable et non pas de perfectionner un modèle de transports existant. Il faut notamment rendre endogène la détermination de la localisation des populations et des emplois, et par conséquent rendre endogène la détermination de la matrice O/D au lieu de la projeter par un calcul théorique plus ou moins élaboré à partir d’hypothèses exogènes de localisation des populations et des emplois. Cette matrice O/D peut alors être utilisée dans le cadre d’un modèle classique de transports.
Ce modèle doit proposer une méthode globale de représentation de la ville, dans laquelle l’approche économique et l’approche sociale –par le biais des tranches de revenus et des prix des logements – sont les fondamentaux de la description, l’aspect « transports » n’étant qu’un des outils contribuant à calculer la localisation des logements et des emplois.
La méthodologie s’est mise en place progressivement sur une douzaine d’années, de 1995 à début 2008. Les étapes principales du développement de cette méthodologie ont été jalonnées par la publication d’articles dans diverses revues, principalement « Etudes foncières », « Transports » et « Les cahiers du Conseil Général des Ponts et Chaussées ».cf annexe 1
La méthodologie retenue
Cinq étapes ont été nécessaires pour constituer un tel modèle, dont le principe a été validé par les meilleurs spécialistes de la puissance publique.
Etape n°1 : Améliorer la connaissance sociale de l’agglomération
Pour cela, il est nécessaire d’examiner l’agglomération francilienne sous les trois aspects suivants :
- l’économie des ménages- et non seulement celle des administrations ou sociétés de transports- en prenant une segmentation du marché par tranches de revenus comme axe fondamental pour guider la construction du modèle
- la densité de population et d’emplois, qui représente schématiquement la demande de transports
- la logique économique de l’ensemble de l’agglomération, considérée comme une machine à fabriquer de la richesse financière et du bien-être.
Etape n°2 :moderniser les outils utilisés en matière de transports
Vérifier la qualité des outils utilisés pour les prévisions de trafic et de recettes et leur adéquation aux observations de terrain
intégrer l’aspect politique et psychologique des péages urbains pour en déterminer une règle d’acceptabilité.( cf. théorie de l’amertume)
Etape n° 3 : Réaliser un modèle global urbain, qui permet d’inclure dans le processus de modélisation l’établissement de la matrice Origine/Destination. Pour ce faire,
assoeoir une méthodologie de localisation résidentielle des habitants asseoir une méthodologie d’implantation des entreprises, toutes deux fonctions de la structure des réseaux de la ville existante, et de ses données sociologiques.
En plus des études propres développées par Vinci et Cofiroute, ce modèle urbain fait la synthèse de théories déjà développées dans les milieux techniques spécialisés « transports », « urbanisme » et « économique ».. Il s’appuie sur des bases de données publiques disponibles à tout un chacun et englobe évidemment le modèle de trafic spécifiquement adapté à l’Ile-de-France, mis au point avec les travaux des deux premières étapes. Sa grande originalité est de faire la synthèse entre ces approches trop séparées (transports, urbanisme, économie), et de s’appliquer à une agglomération existante. Il a été nommé « Pirandello® » et breveté l’an dernier.
Il est maintenant possible de l’utiliser pour tester les différentes hypothèses concernant la politique des transports (infrastructures à construire, tarification à mettre en place) , étudier les politiques du logement que les décideurs politiques seront amenés à étudier, et faciliter la conception d’opérations d’urbanisme cohérentes (logements, emplois et transports).
Le détail des étapes de mise au point des outils de modélisation, des outils politiques et juridiques (étapes 1 et 2) est donné en annexe n°1.
Le modèle global d’équilibre urbain Pirandello®
Principe du modèle Pirandello®
Dans les modèles de trafic classiques, sans trop radicaliser la démarche, on part des populations et des emplois et on en déduit les besoins de transport. C’est déjà un problème complexe…
Ce faisant, on suppose que les seuls comportements à la disposition des résidents face à une modification des transports sont le changement d’itinéraire, voire de mode, et la diminution de leur mobilité. Ceci est en contradiction totale avec l’observation : la mobilité tous modes est en effet constante dans le temps, et les usagers changent très peu d’itinéraire et de mode…
Et cela met de côté toute mobilité résidentielle
Il faut donc prendre en compte dans les représentations des comportements des usagers/riverains trois nouveaux mécanismes importants:
- le premier est la sélection des destinations des trajets, en fonction des temps et des coûts de transport : une augmentation des temps réduit la « portée » des déplacements, mais pas leur nombre. C’est la déclinaison de la « théorie de l’accessibilité » développée par J-G Koenig puis J Poulit et qui permet de prendre en compte la constance de la mobilité;
- le deuxième est le choix de la localisation des ménages, en fonction du prix du m², de l’accessibilité et de leur revenu, les ménages cherchant un lieu de résidence qui maximise leur satisfaction, en tenant compte de l’accessibilité, de la surface du logement et de son prix…;
- le troisième est le mécanisme de formation des prix de l’immobilier et des constructions neuves, les prix et les constructions étant liés au niveau de la demande.
De cette manière, on obtient une représentation de l’équilibre urbain, qui prend en compte l’ensemble des comportements classiques des ménages (sauf le choix de l’heure de départ…), des entreprises, et des propriétaires immobiliers. Ceci permet de réaliser une représentation des déplacements d’une agglomération à l’équilibre urbain.
L’objectif est de déterminer les effets résultant de l’ensemble des actions des agents économiques en présence. De plus, le modèle global urbain permet de distinguer
- les effets directs (par exemple la réduction des distances parcourues suite à une opération de péage urbain qui ont lieu assez rapidement à partir de la mise en place effective) et
- les effets indirects (une fois réalisée au bout d’un temps assez long la nouvelle répartition des populations et des emplois, et le nouvel équilibre des prix de l’immobilier).
On peut ainsi comparer les effets de court terme et les effets de long terme.
Le point de vue du ménage : deux forces contradictoires
L’évolution des agglomérations est un processus assez lent, qui répond prioritairement à des attentes micro-économiques des résidents et des acteurs économiques, avant même de répondre à des évolutions réglementaires ou planifiées. Il est impossible d’aller contre les attentes de la population, ni contre celles des entreprises.
Du côté de la demande, deux attentes micro-économiques ont des effets opposés : la recherche d’une accessibilité (qui tend à la polarisation vers les centres urbains) et la recherche de surfaces de plus en plus grandes habitables ou de bureaux (qui tend à dédensifier les centres urbains).
Ces deux aspects ont été étudiés et quantifiés avec rigueur :
- Par les modèles théoriques urbains monocentriques
- Par la théorie des choix discrets
- Par le modèle dit « de Bussière », qui corrèle la variation des densités au sein des aggloémrations avec leur densité, et qui décrit la vitesse de dédensification des agglomérations européennes et américaines dans le temps
Le point de vue de l’entreprise : accessibilité contre prix foncier
Le point de vue de l’entreprise diffère sensiblement : les surfaces par employés varient relativement peu entre la zone centrale et la périphérie, mais les prix du m² de bureau rapportés à la productivité des employés varient fortement. On ne peut justifier la relation étroite entre l’accessibilité et le prix du m² de bureau qu’en retenant une hypothèse d’amélioration de la productivité liée à l’accessibilité. Ce point spécifique sera développé dans un article futur.
Le point de vue de l’urbaniste : les surfaces et les prix
Les désirs de localisation des ménages et des entreprises ne forment qu’une partie du programme complet, car d’autres mécanismes entrent en jeu du côté de l’offre. Il s’agit essentiellement de l’évolution possible des surfaces bâties et des infrastructures de transport, évolution qui contraint l’urbanisme, et influence les prix. La prise en compte de ces deux mécanismes est décrite de manière plus détaillée ci-après.
Objectif du modèle
On cherche à anticiper les évolutions des répartitions des populations (et des emplois) consécutives à une modification de l’offre immobilière, de l’offre de transport, de la tarification, ou des conditions économiques. Le mécanisme clef ici est le choix du lieu de résidence par le francilien.
L’estimation doit être effectuée à partir de la prise en compte des comportements des ménages et des contraintes réglementaires d’urbanisme. Compte tenu des effets contradictoires mentionnés ci-dessus, il est nécessaire de recourir à un modèle d’équilibre. Ce modèle doit de plus être numérique pour tenir compte des spécificités des réseaux de transports et des règlements d’urbanisme actuels et ne pas rester un outil théorique.
Principe général du modèle
Description formelle du modèle
La description formelle du modèle réalisée comporte quatre parties :
- la description des « ressources » et des « agents » utilisées dans le modèle ;
- la description des grandeurs économiques agrégées utilisées (accessibilité et confort domestique essentiellement) ;
- la description des équations du modèle ; on remarquera, et c’est un point important du modèle, le nombre relativement faible d’équations ;
- la description des « équilibres » retenus ; il y a un « équilibre » pour chacune des ressources du modèle ;
On remarquera à plusieurs reprises que de nombreuses équations du modèle peuvent s’exprimer sous la forme d’un programme optimal (par exemple l’affectation des trafics suivant un principe d’équilibre de Wardrop). Mais cette propriété n’est généralement pas utilisée dans les calculs, à l’exception de la procédure de calibrage, qui est explicitement écrite sous la forme d’un programme optimal.
Par ailleurs, et même si l’illustration du modèle porte sur la région Ile-de-France, la description suivante est générale. Elle montre qu’il serait très possible d’appliquer le modèle à toute ville ou agglomération un peu importante, dès lors qu’on dispose d’un modèle de trafic correctement ajusté et des bases de données sur le logement, les emplois et les revenus par ménage.
Les ressources et les agents
Il y a trois « ressources »:
- les surfaces habitables et les surfaces de bureaux ;
- les surfaces constructibles ;
- les capacités des réseaux (routiers et TC) ;
Parallèlement, il y a deux « agents » explicites :
- les résidents
- les emplois
Les surfaces habitables et les surfaces de bureaux
Dans le modèle Pirandello, on compte les surfaces de logement et de bureaux, et non pas le nombre de pièces.
Les surfaces habitables et les surfaces de bureaux sont définies pour chacune des zones, mais ne sont pas homogènes : elles comportent une composante liée à leur « standing », qui est valorisée de manière plus intense par les ménages à « haut » revenu que par les ménages à « bas » revenu. Par ailleurs, les surfaces de bureaux et de logement sont supposées non fongibles.
Une attention toute spécifique a été portée aux logements HLM. En effet, il y a une forte proportion de logements dont les prix sont « hors marché », et dont l’attribution dépend de paramètres sociologiques et politiques avant de faire intervenir les paramètres de marché. Une loi de distribution spécifique a pu être créée pour représenter correctement, par zone, ce mode d’affectation de logements.
Les surfaces constructibles
Il y a historiquement une tendance importante à la dédensification, et par conséquent à la construction de logements et de bureaux neufs en zone de faible densité. Ce phénomène traduit une compétition entre les zones centrales et les zones de densité faible pour l’augmentation des capacités foncières. Néanmoins toutes les communes n’ont pas la même capacité d’accueil, indépendamment de tout choix de politique locale.
Les capacités des réseaux de transport (routiers et TC)
Les capacités routières et de transport collectif lourd sont une des clefs du développement urbain. D’une certaine manière elles s’apparentent à des surfaces dans la mesure où les capacités sont fonctions directement de la surface de bitume.
On remarquera que dans le modèle Pirandello, les transports collectifs ont une capacité, ce qui permet de valoriser sur une base micro-économique les augmentations de fréquence par exemple.
Ainsi, on peut considérer que l’objectif du modèle est de déterminer l’allocation optimale des surfaces dans une agglomération donnée.
Les résidents et les emplois
Les résidents et les emplois sont pris en compte indépendamment: il n’y a pas identification des employés comme étant des résidents. Les interactions interviennent au travers du calcul de l’accessibilité de chaque agent.
Les résidents sont repérés par leur niveau de revenu du ménage (huit niveaux de revenus), tel qu’il peut être connu dans les enquêtes utilisées.
Les emplois sont repérés par les revenus individuels, et sont regroupés par famille cohérente.
Les grandeurs économiques agrégées utilisées
Il s’agit :
- de l’accessibilité des ménages ;
- de l’accessibilité des entreprises ;
- du confort domestique ;
- du confort des entreprises ;
L’accessibilité des ménages
Formulation classique
Chaque ménage, au moment de choisir son futur logement, prend en compte dans sa recherche l’emplacement, défini par son quartier et la facilité à se déplacer et à rejoindre d’autres quartiers : on vit dans un quartier, et non pas seulement dans son appartement ou sa résidence. Encore faut-il pouvoir valoriser l’attrait « économique » d’un quartier en fonction de paramètres objectifs, dont on peut mesurer la variation.
La théorie de l’accessibilité est ici un outil très pertinent pour expliquer l’attrait des grands centres urbains : c’est la préférence pour un univers de choix important et diversifié, permettant de consommer un ensemble de services très vaste (restaurants, spectacles, commerces spécialisés,…). Elle prend en compte simultanément l’offre de transport (sous la forme d’un temps généralisé) et les opportunités à destinations sous forme d’utilités.
L’accessibilité est définie de manière classique par une formulation exponentielle (même si ce n’est pas la meilleure formulation possible), et avec pj la population (ou toute autre grandeur à caractère démographique) et un terme indiquant la décroissance avec la distance (ou plus exactement le temps ou le coût généralisé) pour la classe de revenu r) :
(GE1)
où : A(i,r) est l’accessibilité de la zone i pour la classe de revenus r ;
α et λr sont des constantes définies par ajustement ;
ttijr est le temps de transport de la zone i à la zone j pour le revenu r ;
cijr est le coût de transport de la zone i à la zone j pour le revenu r ;
pj la population de la zone j ;
L’accessibilité s’exprime ici en unités de population ou d’emplois. C’est un indicateur non local, dans le sens qu’il fait intervenir les populations, les emplois et les temps de parcours de l’ensemble du réseau.
On remarque par ailleurs que le paramètre du temps est en pratique indépendant du revenu, et que d’autre part les ajustements en temps sont assez satisfaisants, même avec une loi exponentielle :
Dans ces conditions, on est conduit à réécrire cette équation sous la forme suivante, ne présentant plus qu’un terme λ, :
(GE2)
On peut alors rechercher le revenu compensatoire correspondant à l’accessibilité A pour un nombre fixe de déplacements. Cette constance du nombre de déplacements est un résultat d’observation depuis 1976 en région Ile-de-France (en moyenne 3,5 déplacements par jour et par personne de plus de 6 ans), et peu dépendant du lieu de résidence:
Dans ces conditions, on peut montrer aisément que l’on a :
(GE3)
Dans cette équation θ est le facteur de proportionnalité de la valeur du temps au revenu horaire. C’est donc un coefficient proche de 1, mais qui pour une même personne s’écarte plus ou moins de 1 en fonction du déplacement (en d’autres termes c’est une distribution de probabilités…)
Cette formulation généralise donc suivant deux directions l’équation classique du « modèle mono-centrique », dans lequel l’accessibilité est calculée uniquement par rapport à la zone d’emplois censée être ponctuelle et au centre de l’agglomération, et pour une valeur du temps unique.
Il est important de remarquer que la fonction d’accessibilité ainsi définie est une fonction de demande pure, et qu’elle ne fait pas apparaître de saturation : il se peut que la probabilité sommée sur l’ensemble des origines d’aller sur une zone particulière dépasse 1 ! La prise en compte des saturations est effectuée dans le calcul effectif de la matrice de demande, c’est-à-dire dans le choix des destinations.
« Qui se ressemble s’assemble » ou la ségrégation naturelle des villes
Ces lois statistiques classiques donnant les formulations de l’accessibilité en fonction de la population ou des emplois doivent être complétées pour prendre en compte la sociologie des rencontres effectives : en effet, les rencontres se font largement à l’intérieur d’une même catégorie socio-professionnelle ou entre gens ayant des revenus analogues.
Dans ces conditions, il est nécessaire de « sur-pondérer » les destinations ayant une « proximité » sociologique plus importante et au contraire de « sous-pondérer » la probabilité d’une rencontre entre personnes de classes de revenus très éloignées. En d’autres termes, il est nécessaire de définir une « population équivalente » de revenu donné, vue depuis une autre classe de revenus.
La technique retenue de manière préliminaire est de faire intervenir une pondération entre les classes de la manière suivante :
(GE4)
où : p(i,rj,rk)* est la « population équivalente » de la zone i de la classe de revenus j vus par la classe de revenu rk ;
p(i,rj est la population de la zone i et de revenu rj ;
γ est une élasticité définie par ajustement ;
Accessibilité des ménages : formulation complète des pj
En pratique, l’accessibilité des résidents porte à la fois sur les populations et les emplois. On a donc la formulation suivante :
(GE5)
où : e(i,rk) est l’effectif de la classe d’emplois k dans la zone i ;
ω est une constante déterminée par ajustement ;
Formulation alternative de l’accessibilité des ménages
La formulation exponentielle de l’accessibilité peut être remplacée par la formulation « à élasticité constante », qui permet comme le montre le graphique précédent un ajustement plus précis de la loi de demande pour les distances longues et les distances courtes, typiquement moins de 20 minutes et plus de deux heures. D’un point de vue micro-économique, cela revient en fait à privilégier la variation relative de l’accessibilité par rapport à la variation absolue. Dans ces conditions, on a :
(GE6)
L’accessibilité des entreprises
Une formulation analogue de l’accessibilité est retenue pour les entreprises, mais elle porte uniquement sur les emplois. Par ailleurs, le principe « qui se ressemble s’assemble » ne s’applique pas aux professionnels, ou tout au moins pas avec la segmentation retenue.
Dans ces conditions, on a :
(GE7)
Les choix de localisation des entreprises correspondent explicitement à une stratégie de maximisation du bénéfice. C’est logique, et rassurant de voir que la rationalité observée pour le comportement des ménages s’applique aussi bien au comportement des entreprises.
Le secteur dominant en Ile-de-France est le tertiaire, car cela fait bien longtemps que la plupart des entreprises industrielles ont déplacé loin de l’agglomération leur outil productif, et ne réservent à cette région que la partie commerciale, administrative et la partie recherche, éléments qui nécessitent une forte accessibilité.
Formellement, dans Pirandello on écrit l’équation de la productivité d’un emploi tertiaire :
Ce qui est tout à fait fondamental dans cette approche de productivité est l’observation suivante, qui fera l’objet de développements dans un article ultérieur : il est possible de relier de façon directe le PIB régional et l’accessibilité, par une simple équation de « type Cobb-Douglas » :
Des ajustements ont été faits sur le zoning Pirandello® par maximum de vraisemblance pondéré (WESML) contraint. Pour fixer les ordres de grandeur, la productivité d’un salaire identique ainsi estimée dans des zones très accessibles (par exemple le centre de Paris) est environ 40% supérieure à celle d’une zone peu accessible de Grande Couronne. Cette observation fondamentale justifie l’absolue nécessité de faire des investissements supplémentaires pour conserver la compétitivité francilienne, et donne une clé pour évaluer la richesse produite par les investissements à réaliser. C’est la piste à examiner pour trouver le financement des infrastructures à construire.
Le confort domestique
Formulation
Parallèlement, et d’un seul point de vue micro-économique, il est clair que la majorité des ménages a un goût (un consentement à payer…) pour habiter des surfaces convenables et disposer éventuellement un jardin.
Il y a donc un désir croissant dans le temps d’occuper des superficies plus importantes, lié à l’augmentation du niveau de vie.
On supposera ci-dessous que la satisfaction, mesurée directement par son consentement à payer, est liée à la surface, à la part de résidences individuelles (PLI) et au revenu par une formulation du type :
(GE8)
où : ε est une distribution de probabilité, non nécessairement normale, mais centrée ;
pour les immeubles de faible standing ε < 0 ;
pour les immeubles de haut standing ε > 0 ;
p0,s0,k,α,β,γ sont des constantes déterminées lors de l’ajustement ;
La distribution des ε a pour objectif de prendre en compte le « standing » d’un appartement, dont le service rendu ne se limite pas tout à fait à la mesure de sa surface, mais inclue bien d’autres paramètres : ensoleillement, type de construction, étage, équipement, qualité des prestations…Pour fixer les ordres de grandeur, l’écart-type de la distribution est de l’ordre de 20%.
On écrit simplement ici que la satisfaction liée à l’habitat est à rendement décroissant, que le revenu intervient de manière croissante, qu’il y a une utilité marginale considérable pour des très petites surfaces, et que le « standing » est valorisé différemment par les ménages riches et par les ménages pauvres. Pour donner des ordres de grandeur, s0 est de l’ordre de 20 m² et p0 est analogue à un prix moyen du logement. Il est important de remarquer que l’utilité marginale du confort domestique peut prendre des valeurs aussi élevées que nécessaire pour les calculs d’équilibrage dans la mesure où l’on a :
(GE9)
En ce qui concerne la formation des prix du logement, les paramètres du modèle Pirandello® ont été calibrés de façon à refléter les études les plus récentes sur l’Ile-de-France lancées par le PUCA.
Le confort des entreprises
De la même manière, on peut définir un « confort d’entreprise », comme la surface par tête à disposition des employés. Le terme se référent à la résidence individuelle n’est pas repris.
Utilisation du modèle Pirandello®
Ce modèle a une caractéristique unique pour un modèle urbain : il est utilisable.
A l’opposé de bien des modèles urbains, le nombre d’équations à mettre dans le programme informatique est faible, et le nombre de paramètres pour caler le résultat sur la situation actuelle est également limité.
L’établissement du modèle francilien a été long : plusieurs années de recherches méthodologiques et de recherches d’information ont été nécessaires, ainsi que l’analyse et la mise en cohérence de bases de données variées. Mais aujourd’hui, créer un modèle urbain sur une agglomération existante disposant de bonnes bases de données n’est plus difficile, et peut se faire rapidement (quelques semaines, selon les bases de données disponibles). Ensuite, vu la capacité de calcul des ordinateurs actuels, il est possible en une dizaine de jours de travail de programmer et tester des hypothèses simples de tarification ou d’offre de transport supplémentaire, et d’avoir les résultats « à l’équilibre », toutes choses égales par ailleurs, en termes de localisation de population par tranche de revenus, prix du logement, localisation d’entreprises, bénéfices socio-économiques, consommation de carburant,… ou tout autre paramètre liés au transport et au logement.
En revanche, il y a des limitations à ce modèle qui sont de deux natures : d’une part il ne tient pas compte (aujourd’hui) de l’extérieur de la zone étudiée, c’est-à-dire :
- qu’il ne peut pas dire combien de personnes quitteront le territoire étudié si les investissements, en logement comme en transports, ne sont pas à la hauteur de ce qu’on attend d’une agglomération vivante
- il ne peut pas dire à quelle vitesse s’établira l’équilibre urbain qu’il aura calculé : il faut donc l’utiliser en indication de tendance.
Ces deux inconvénients n’empêchent nullement l’utilisation de Pirandello® pour tester la rentabilité économique et financière d’investissements publics tels que ceux nécessaires à la restructuration de la ville (équipements publics, infrastructures de transports), ou de politique tarifaire.
Un exemple d’application : le Schéma Directeur francilien
Les réflexions en cours sur le Schéma Directeur d’Ile-de-France donnent un bon sujet d’application à Pirandello®.
Le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de l’Ile-de-France conçu en 1965 pour 14 millions d’habitants avait lancé la structure des réseaux de transports et la construction des villes nouvelles. Le plan de 1976 est un ajustement du plan de 1965. Il conserve les grandes infrastructures routières et TC, et note la difficulté engendrée par la concentration à l’Ouest des emplois de cadres, et à l’Est des logements des ménages les moins aisés, conduisant à une ségrégation sociale de la zone agglomérée.
Le projet de SDRIF de 1990 avait conservé une dynamique forte de développement, mais le résultat final (SDRIF de 1994) reflète une volonté de réduire fortement les grands investissements, notamment en logements et en infrastructures routières. La dimension environnementale y est apparue plus fortement que précédemment, mais toujours sans calcul socio-économique sérieux, notamment sur le logement. Il en résulte, 14 ans plus tard, une carence en logements, qui conduit à la baisse de l’attractivité de la Région, et à l’augmentation du taux de chômage (supérieur au taux moyen de la France, alors que c’était l’inverse en 1999).
Dès 1995, il était clair que la méthodologie employée pour la conception et l’approbation du nouveau SDRIF n’était pas la bonne pour deux raisons majeures. D’une part une interprétation malthusienne des nouvelles contraintes écologiques a conduit à réduire les investissements en transports, tant publics que routiers et, corrélativement, la construction de logements, conduisant à la situation de crise dans laquelle nous sommes aujourd’hui. D’autre part la décentralisation des pouvoirs d’urbanisme a conduit à renforcer le pouvoir des gens qui ne veulent pas « faire » par rapport à celui des gens qui veulent « faire ».
Le résultat en est simple : l’agglomération perd de son efficacité économique et de son harmonie sociale car plus aucun investissement lourd ne vient lutter contre la saturation des infrastructures de transports, ni contre les forces bien connues, puissantes et spontanées, de ségrégation spatiale.
L’observation de la réalité telle que le PUCA l’a étudiée – et que le modèle l’a repris – montre clairement que la valorisation d’une zone (valeur des logements, salaires des gens) est liée à son accessibilité.
En examinant les opérations :
- de Plaine Communes, liées géographiquement au Stade de France ;
- de la rénovation du centre de Marseille, liée au tunnel Prado-Carénage, à la rénovation des docks et à l’arrivée du TGV à St Charles ;
- de l’agglomération lyonnaise (quartier de Vaise et presqu’île),
on constate qu’il y a eu sur ces sujets une volonté politique forte de rénovation urbaine, associée à des investissements lourds en transports et en équipements publics. Après quelques années, le résultat est là et ses quartiers se sont transformés par un dispositif gagnant-gagnant car la collectivité récupère progressivement sous forme d’impôts supplémentaires liés à l’activité économique le montant qu’elle a investi pour lancer le processus urbain.
En Ile-de-France, le Schéma Directeur de 1965 a lancé les villes nouvelles, la structuration d’un réseau de transports et la restructuration des « pôles de banlieue ». Le Schéma Directeur de 1976, commentant celui de 1965, s’exprima comme suit :
« En zone agglomérée, la préoccupation essentielle était de restaurer le tissu urbain par la concentration, en quelques points choisis, d’emplois et de services susceptibles d’assurer la desserte de plusieurs centaines de milliers d’habitants. Les transports jouant un rôle prépondérant dans la réussite de ces centres secondaires, ceux-ci étaient situés à proximité de la rocade de banlieue (devenue depuis A 86) et dans les meilleurs cas desservis par des transports en commun en site propre. L’effort était porté sur la partie Est de la zone agglomérée, particulièrement défavorisée.
Des huit pôles envisagés en 1965 : la Défense, Herblay, SaintDenis (Stains Villetaneuse), Le Bourget, Bobigny, Rosny-sous-Bois, Créteil et Rungis, celui d’Herblay était retiré en 1969 tandis qu’était ajouté celui de Vélizy.
Si les objectifs auxquels doivent répondre les centres urbains de la banlieue étaient clairement définis, leur contenu demeurait plutôt indicatif qu’impératif afin de saisir les opportunités d’aménagement qui apparaîtraient ».
La tendance spontanée à la ségrégation que montrent toutes les villes implique qu’il se forme des poches de pauvreté (par exemple la partie Nord du département 93), qui ne peuvent pas se développer sans un apport massif d’investissements, d’abord publics, puis privés.
Aujourd’hui, la priorité est de finir le réseau de transports et de poursuivre la restructuration des « pôles de banlieues » pour conserver la terminologie de P. Delouvrier. Ceci réduira à terme la « fracture urbaine » mesurée par le PUCA. Pensons notamment au Nord de la Seine St Denis, dont la localisation par rapport à l’aéroport de Roissy, à Paris et aux autoroutes devrait faire une « banlieue privilégiée », alors qu’elle en est encore très loin…
Nous devons donc examiner des projets de restructuration de centres urbains, couplés à des projets de voiries routière à péage reliant les zones plutôt riches de la région aux zones plutôt pauvres. Les projets de transports en commun seraient bâtis sur ce même principe, et engendrent un transfert de richesse des zones riches vers les zones pauvres.
Conclusion : des pistes pour financer les infrastructures
Le modèle Pirandello® permettant de chiffrer l’impact de tel ou tel aménagement sur le prix des logements et sur l’implantation des bureaux, il est possible d’en déduire qui va gagner et combien au jeu de l’investissement. A partir de cette estimation, les sommes à investir n’étant finalement pas considérables par rapport à la richesse des régions (on va parler d’un rythme d’investissement de l’ordre de 1% à 1,5% suivant les cas), il est possible de prendre des décisions de façon rationnelle pour déterminer l’assiette logique et politiquement acceptable de création d’un prélèvement nécessaire pour lancer les concrètement les opérations. La création d’un fonds spécifique, comme cela a été fait à Oslo lors de la mise en place du péage urbain, ou en Ile-de-France avec des taxes d’aménagement particulières, est alors envisageable, car politiquement explicable.
Dans le cas francilien, si l’on se réfère au lien établi ci-dessus entre l’accessibilité des entreprises et le PIB de la région, il est facile de voir que le supplément d’investissements nécessaire pour rattraper des retards d’investissements est largement compensé par les impôts engendrés par le supplément d’activité économique de la région. Le fonds se rembourserait sur une période de 40 ans.
Bien entendu, cette approche économique globale demande une gouvernance également globale et cohérente sur la zone à développer et la durée de l’opération. C’est une question d’une autre nature, qui conditionne cependant l’application d’une vraie politique économique.
Annexe 1
1 Outils de modélisation de transport routier
En premier lieu, nous nous sommes attachés à examiner la validité des outils de modélisation de transports en Ile-de-France L’opération A 86 a été le noyau autour duquel se sont faites les analyses et les approches nouvelles concernant par exemple la représentation des files d’attente et la segmentation fine de la clientèle des voies à péages (tarification optimale pour le concessionnaire). De nombreuses mesures de temps de parcours nous ont conduits à modifier la structure du modèle de Cofiroute pour mieux tenir compte des files d’attente. Les études sur la valeur du temps et le consentement à payer ont été particulièrement systématiques, en s’appuyant sur l’analyse des ouvrages à péage existants dans le monde, qu’il y ait eu succès ou échec du processus pour avoir une bonne segmentation de la clientèle.
2 Outils politiques
Puis nous avons étudié l’acceptabilité politique des péages routiers. L’idée principale est qu’en zone urbaine les modèles ne savent pas tenir compte de la fréquence d’utilisation d’un ouvrage à péage par un automobiliste donné, et ne prennent pas correctement en compte le choix –ou le degré d’obligation- d’utilisation d’une voie à péage par rapport à un autre itinéraire ou un autre mode de transports. Or ceci joue fondamentalement sur la perception politique du péage sur une voie publique urbaine, et donc sur la décision publique de faire ou de ne pas faire un tel type de voie. L’exemple réussi du tunnel Prado-Carénage à Marseille et l’échec relatif du contournement Nord de Lyon donnaient des valeurs chiffrées particulièrement intéressantes.
Nous avons ensuite examiné particulièrement en Ile-de-France
- les paramètres de description de la ville (coefficient d’occupation des sols, densité d’activité humaine, densité de richesses et valeurs hédoniques), ainsi que
- les coûts liés à la voiture et les coûts liés au transport en commun, en séparant le coût financier ressenti pour l’usager qui prend sa décision modale et le coût financier pour la collectivité, en différentiant les trajets par motifs et localisation géographique.
- les zones de pertinence des différents types de transports en commun et la question du péage urbain avaient été évoqués, ainsi que celle du péage PL en Ile-de-France.
La question de l’acceptabilité politique du péage routier étant centrale pour la finition du Schéma directeur tel que dessiné en 1965, nous somme revenus sur une analyse détaillée des comportements des automobilistes et des décideurs politiques vis-à-vis du péage en zone urbaine, et avons défini avec Claude Abraham une grandeur permettant d’estimer de façon chiffrée « l’amertume » des gens qui sont au point de choix d’une voie à péage et d’une voie gratuite, et qui ne peuvent pas payer le péage. Cette estimation permettrait, si les gens en avaient envie, de mettre un peu de rationnel dans les discussions sur la tarification, et de faire taire quelques râleurs systématiques lors des enquêtes publiques.
D’une façon pratique et systématique, nous avons recalculé les « amertumes » engendrées par la tarification des ouvrages dont Vinci était concessionnaire, et cela a conforté notre approche su ce sujet
3 Outils économiques et juridiques
Par conséquent il a été possible de poursuivre l’analyse économique chiffrée du tunnel Prado-Carénage à Marseille, tunnel qui a un impact très puissant sur la structuration du centre ville, plus puissant encore que le contournement Nord de Lyon ne l’a eu sur le cœur de l’agglomération lyonnaise. Les modèles urbains (modèle urbain monocentrique et théorie des choix discrets) ont été abordés. Pour les calculs économiques, le problème du taux d’actualisation des collectivités s’est posé directement, et le taux élevé, fixé par la France en 1988, s’est avéré inadapté à l’époque actuelle, surtout si l’on prend en compte les contraintes à très long terme engendrée par l’augmentation de la pression des contraintes écologiques.
Lors du CIADT de décembre 2003, le Ministère de l’Equipement a fait demander par Matignon au Commissariat Général du Plan de lancer une révision du taux d’actualisation du Plan, taux servant à évaluer la rentabilité économique des investissements publics, notamment dans le secteur des transports. Vinci a pu faire part de son expérience sur ces sujets, et a contribué à réduire de 8% à 4% la valeur du taux d’actualisation économique de l’Etat. Au cours des discussions, la question du type de contrats publics a été également abordée : contrats entièrement payé par les finances publiques à travers les impôts ou développement des DSP pour solliciter la clientèle finale. Un nouveau critère est apparu, adapté aux périodes transitoires d’endettement fort de l’Etat : la maximisation du bénéfice socio-économique par euro public investi. Les résultats des études et discussions ont été synthétisés dans le rapport Lebègue, publié en janvier 2005.
Mais dans de nombreux cas, les infrastructures publiques ne peuvent pas faire appel au client final pour le financement de la construction et de l’exploitation : hôpitaux, commissariats de police, gendarmeries, prisons, universités,….C’est pourquoi Vinci a participé activement à la mise en place des contrats de partenariat, qui viennent en complément de la concession/DSP lorsque les recettes commerciales ne permettent pas de mettre en place le financement.