A quoi sert une route

Comment fait-on utile et pas cher? Qui finance?
Qui paye in fine?

Vincent Piron  PIRON Consulting

(1) Adam Smith : rôles de l ’Etat et efficacité des coûts

 Devoir de défense nationale
 Devoir de protection de chaque membre de la société contre l ’injustice et l ’oppression des autres membres
 Développement des biens publics (institutions, édifices et travaux publics) que le profit d ’un seul individu ou d ’un petit groupe de citoyens ne peut suffire à construire
 Efficacité des coûts : « La maxime de tout chef de famille prudent est de ne jamais essayer de faire chez soi la chose qui lui coûtera moins cher à acheter qu’à produire. »

(2) Jules Dupuit : notion de surplus

  La courbe de consommation
  Le surplus du consommateur
  La stratégie du monopoleur privé
  La contre-stratégie : gestion publique dans l’intérêt social : Le monopoleur public peut réaliser une solution meilleure du point de vue de l ’intérêt social en ayant une politique de discrimination des prix
  Peu d’intérêt pour les coûts, supposés minimaux ou optimaux
  Peu d’intérêt pour la question de la disponibilité du capital

(3) Maurice Allais : gestion publique

Dans les 6 approches de la notion de surplus, Maurice Allais retient notamment :
 Approche III : le surplus est la somme des surplus du consommateur
 Approche V : le surplus est défini à partir des choix possibles
 Utilité perdue : part de l’utilité qui pourrait être procurée aux usagers si le service était vendu moins cher
 Il y a donc un écart entre l ’optimum pour le monopoleur et l ’optimum social, qui minimise l’utilité perdue
 Dans le cas d ’une gestion publique : tarification au coût marginal

L’Etat régulateur : son rôle premier

 La route est un service : l ’exploitation optimale du réseau déjà construit (entretien, sécurité, disponibilité)
 Aménagement du territoire
 Définition des liaisons à réaliser, choix modal fer-air-route
 Définition des priorités des réalisations
 Interfaces avec les villes et les autres collectivités territoriales qui sont devenues techniquement compétentes
 Financement : qui paye quoi dans la cadre constitutionnel français et juridique européen
 Etablissement de procédures efficaces pour le lancement des projets, l’exécution des contrats et la minimisation des coûts

Amertume et décision politique

 Diffusion croissante de l’information aux citoyens, mais l ’information est-elle correcte ?
 Apparition d ’une liberté de choix dans l ’offre et d ’une flexibilité de la demande
 Choix modal,
 Choix horaire, choix de destination
 péage ou gratuité apparente
 Amertume des exclus, nuisances sur et des riverains
 Décision politique basée sur quels critères : le poids politique des râleurs locaux n ’est contrebalancé par aucun processus plus global ou plus rationnel

L’Etat acteur : faire ou faire faire

 Revenons à Adam Smith : faire faire si cela coûte moins cher que de faire
 Mais faire est plus aisé que faire faire, et donne des satisfactions plus directes et plus tangibles, mais les tâches d ’exécution ne relèvent cependant pas du rôle de l ’Etat
 La plupart des tâches dites de « services au public » peuvent être sous-traitées car ce ne sont pas des tâches de gouvernance (comme le matériel loué par des entreprises de TP).
 Dans le domaine autoroutier, l ’Etat est régulateur, concédant, concepteur, concessionnaire, exploitant, actionnaire, prêteur.
 La limite : pour bien faire faire, il faut savoir faire

Le transport durable

 La prise de conscience progressive depuis 30 ans et la formalisation par les protocoles de Rio et Kyoto
 John Rawls, Amartya Sen et la prise en compte de l ’amertume au niveau international
 Restons pratique et améliorons la connaissance
 : Le coût de fonctionnement des villes (péage urbain, de stationnement, politiques urbaines) : sujets non quantifiés
 Le coût complet du ferroviaire, du routier et de l’aérien, sujets aujourd’hui interdits au public.
 Le PIB transports à réévaluer (positif et négatif) : à définir
 modèles de trafic en période de congestion et valeur du temps
 Aujourd ’hui, la population ne sait que protester et n ’intervient qu’exceptionnellement avec un apport positif

L’Etat médiocre gestionnaire

Pour lui-même :
 pas de compte de bilan
 Astuces d’arracheur de dents pour respecter les critères de Maastricht
report de la dette sur RFF, EDF, …

Pour les entreprises :
 Normes comptables mal adaptées aux opérations d ’investissements
 Très peu de bilans économiques ex post des opérations de transports
 Mode de passation des marchés à améliorer :
 Pas d’optimisation sur la durée (construction-exploitation)  Peu de sollicitation de l’innovation privée

Faire ou faire faire, la réponse évolue

 La croissance de la masse critique des entreprises privées ou assimilées (Airbus, Alstom, Bouygues, Vinci, BNP, Crédit Agricole,…) leur donne des possibilités et des compétences techniques et financières qui n ’existaient pas il y a 20 ans en dehors de la sphère publique
 L ’expansion internationale de ces groupes leur confère un retour d ’expérience plus large que ce que peut produire la seule France, que ce soit du point de vue technique ou organisationnel
 L ’élévation du niveau de vie et de culture de la population lui confère un meilleur jugement sur les actions publiques

L ’Etat médiocre économiste

Corridor Capacity and Trafic Demand

Les Etats sont rigides et paupérisés

 L’Etat médiocre gestionnaire financier
 L’Etat médiocre calculateur des surplus qu’une infrastructure (route, fer) engendre (transports et urbanisme : voir Lyon contournement Nord)
 L’Etat médiocre optimisateur des dépenses
 Les Finances (Court T) contre l ’Equipement (Long T)
 Dans le domaine des investissements, le taux d’actualisation de l’Etat est celui des pays en voie de développement. En routier, il fait des bénéfices avec la TVA sur le dos des collectivités territoriales
 L’Etat mauvais gestionnaire de personnel

L’Etat corporatiste : j’existe, donc j’existerai

 En urbain, le pourvoir passe aux collectivités, la compétence technique au privé, mais les structures DDE n ’évoluent pas, ou trop peu.
 L’intérêt propre de l’Etat ou de certaines corporations de l ’Etat ou des collectivités finissent par aller contre l’intérêt des citoyens (contrôleurs aériens ou dockers à une certaine époque)
 Le personnel du secteur public contre la sous- traitance au privé dans les domaines de pertinence du privé
 Pas (ou si peu) de sanctions en cas d’erreurs
 Choix des dirigeants dans un vivier réduit

L’Etat médiocre investisseur « physique » (2)

 La création de surplus exige un investissement en capital.
 Avec les contraintes sur la dette publique, le coût du capital public devient infini.
 A contrario, l’augmentation de l’assise financière des sociétés privées réduit leur coût de capital.
 Le surcoût de l ’emprunt privé par rapport à l ’emprunt public est négligeable devant le surcoût du capital public par rapport au capital privé.
 Tous les pays européens cherchent à développer des fonds d ’investissement routier pour porter la dette de la construction initiale du réseau minimal structurant

Montant versé à la ville de Marseille

Surplus et amertume à Marseille

Réflexions politico-économiques sur les concessions de Vinci

Les acteurs
L’acceptabilité politique du péage
Le surplus pour la collectivité
La rentabilité économique
La rentabilité financière de la collectivité

l’Etat médiocre investisseur « physique » (1)

 L’Etat se concentre sur des tâches de services (police, éducation, justice, armée,..)
 Il ne fait pas de raisonnement « projet » : les recettes et les coûts ne sont pas identifiables ni étalonnés par rapport à un résultat mesurable
 Les choix d ’investissements se font sur la rentabilité financière au lieu de la rentabilité économique, car la contrainte financière instantanée est trop grande,
 C’est la négation du rôle spécifique de l’Etat, qui perd son rôle d’entraînement

Surplus et amertume au Canada

Les 7 acteurs d’une concession, les 2 contrats tacites, le contrat

Surplus économique et financier du concédant

Contrat tarifaire à Marseille

Domaines de pertinence de l’action privée

 Conception : efficacité maximale, pas de surinvestissements
 Construction économique et facile d’entretien en liaison avec la conception
 Exploitation commerciale dans le cadre du contrat tarifaire
 Gestion du personnel (souplesse, avancement)
 Financement de la part « rentable » de l’investissement
 Coopération permanente avec les pouvoirs publics dans une réflexion commune sur les buts à atteindre et les structures nécessaires à mettre en place
 Définition pertinente du partage des risques et profits avec le public

Domaines de pertinence de l’action publique

 Définition des fonctionnalités des ouvrages et définition de la politique tarifaire
 Evaluation convenable des surplus et des externalités négatives pour avoir des bilans corrects
 Etablissements de modèles de trafic
 Etablissements de modèles comportementaux
 Régulation amont de la demande de transport : « durabilité »
 Mise en place des procédures administratives et juridiques favorables pour faire ce qui doit être fait
 Mise en place des procédures de financement adaptées
 Explication au public : qui paye et combien